Road trip en Sardaigne : balade dans le centre historique de Sassari

Troisième jour de notre voyage en Sardaigne, on quitte la jolie ville de Castelsardo, ses couleurs, ses escaliers, son campanile, sa vue sur la mer, et la côte nord de l'île pour rejoindre Alghero et la côte ouest. En route, et puisqu’elle se trouvait sur la nôtre, on a fait étape à l'intérieur des terres dans la ville de Sassari, ancienne citadelle fortifiée riche aujourd'hui d'un beau patrimoine architectural et historique.

L'histoire de Sassari à travers les siècles

Le territoire sur lequel se trouve aujourd'hui Sassari est habité par l'Homme depuis la période pré-nuragique (c'est-à-dire plus de 2000 ans avant notre ère), comme en témoignent de nombreux vestiges (domus de janas, menhirs, dolmens, etc.).

De la fondation de la ville à celle des fortifications

La ville de Sassari daterait, elle, du 11e siècle. Suite à de nombreuses incursions des pirates sarrasins, les habitants de Turris Libisonis (dont nous avons visité les vestiges à Porto Torres) se sont progressivement réfugiés dans les terres et notamment à Sassari. La ville et l'église de "Sancti Nicolai de Tathari", apparaissent dans des actes datant du 12e siècle.

Durant la seconde moitié du 13e siècle, Sassari est dirigée par un podestà (c'est-à-dire le premier magistrat de la ville), sous la gouvernance de Pise puis de Gênes. A la fin du 13e siècle, en 1294, la ville est érigée en commune libre et promulgue les « Statuts de Sassari ».

A partir du 13e siècle, Sassari est enserrée dans des remparts, surveillés par 36 tours (aujourd'hui il n'en reste plus que six), qui sont fortifiés jusqu'au 19e siècle. Même si aujourd’hui il ne reste que quelques portions de ce mur d’enceinte, certaines parties de la ville, avec leurs rues resserrées qui se croisent et s’entrecroisent (notamment autour de la Via Alberto Lamarmora) laisse entrevoir ce passé médiéval.

Une Histoire mouvementée, des architectures multiples

Au 14e siècle, et pour un siècle, la ville forme une alliance avec le Royaume d'Aragon durant lequel se produiront révoltes et épidémies. Il reste quelques vestiges de cette époque mouvementée mais le plus important, le château aragonais, a été détruit à la fin du 19e siècle.

A partir du 16e siècle, les bâtiments et monuments construits à Sassari sont le résultat de l'influence de l'architecture italienne. Au 17e siècle, c'est la Maison de Savoie qui étend sa domination sur la ville et la façonne grâce à la construction de nouveaux bâtiments mais aussi à une nouvelle organisation de la ville.

A la fin du 19e siècle, Sassari voit apparaître dans ses rues, l'art nouveau puis l'art déco, ses édifices publics deviennent plus austères.

Une balade hors du temps à Sassari

On a parcouru un peu plus de quatre kilomètres à travers la ville, en suivant les panneaux ou au hasard de ce qui attirait notre regard au bout de la rue, par-dessus les toits, … Et le hasard a plutôt bien fait les choses puisqu’on a pu voir, en plus des jolies rues que l’on empruntait, un certain nombre de places et de bâtiments emblématiques de la ville.

Premiers pas dans Sassari, guidés par le hasard

Garés dans le Parcheggio Saba Emiciclo Garibaldi, on a pris la direction du centro storico grâce à un panneau ... que très vite nous avons arrêté de suivre ! A peine arrivés au croisement de la via Carlo Alberto et de la via Enrico Costa, le clocher de la Parrocchia San Giuseppe nous a fait de l’œil ...

Construite à la fin du 19e siècle, la Chiesa di San Guiseppe est l'oeuvre de Francesco Agnesa. Il s'est inspiré de la Basilica San Giorgio Maggiore à Venise pour la façade, et de la Chiesa di Santa Caterina à Morès pour le clocher.

Arrivés sur la via Giorgio Asproni, on a continué vers le nord et longé les murs de la Carcere di San Sebastiano, une prison vieille de plus de 140 ans, aujourd'hui converti en centre judiciaire. Face à elle, le long de la via Roma, je suis tombée sous le charme du Palazzo Cugurra.

Construit durant la seconde moitié du 19e siècle par la famille Cugurra, ce palazzo est une petite merveille d'architecture qui mêle des éléments néo-baroques et d'autres inspirés par l'art nouveau. Le tout donne un mélange singulier mais magnifique, composés de nombreux détails à observer et à photographier.

Clocher de la Chiesa di San Guiseppe
Clocher de la Chiesa di San Guiseppe
Mur d'enceinte de la Carcere di San Sebastiano
Mur d'enceinte de la Carcere di San Sebastiano
Palazzo Cugurra
Palazzo Cugurra

La Piazza d'Italia et la Piazza Castello

Notre balade nous a ensuite conduit sur la place principale de Sassari, la Piazza d'Italia. Cette grande esplanade aujourd'hui au cœur de la ville se trouvait à l'extérieur des remparts de la vieille ville. Elle a d'ailleurs été construite, en 1872, dans le cadre du nouvel aménagement de la ville.

C'est sur cette impressionnante place carrée que se trouve le siège de la Province de Sassari, abrité dans un bâtiment à la façade néoclassique remarquable. A l'opposé, par delà le monument à la mémoire de Vittorio Emanuele II, le Palazzo Giordano, de style néo-gothique apporte une petite touche vénitienne à cette place.

En continuant notre balade vers l'ouest de la ville, un autre clocher a attiré notre attention, celui de la baroque Chiesa del Rosario, cachée de la Piazza Castello (où se trouvait autrefois une des portes de la citadelle médiévale) par un bâtiment malheureusement sans intérêt.

La première version de la Chiesa della Madonna del Rosario a été construite en 1635, en même temps que le couvent. Elle a été reconstruite et agrandie vingt ans plus tard pour devenir l'église visible encore aujourd'hui. Les travaux de la façade ont été achevés en 1759 par Gavino Pirinu, un natif de Sassari.

A l'intérieur de l'église se trouve le retablo del Rosario, magnifique "mur" en bois sculpté, peint et doré qui occupe toute la partie derrière l'autel. Les chapelles de de la Chiesa del Rosario sont également décorées avec de superbes motifs qui donnent des allures de petit palais à cette église, pourtant assez sobre vue de l'extérieur.

Siège de la Province de Sassari
Siège de la Province de Sassari
Palazzo Giordano
Palazzo Giordano

Des rues animées aux rues désertes, les deux visages de Sassari

Après une pause rafraîchissante dans le Largo Ittiri, on a repris notre balade en observant les façades de l'animé Corso Vittorio Emanuele II. Sur le corso, l'actuel Teatro Civico, de style néoclassique, a pris la place de l'ancien Palazzo di città en 1826 qui faisait face, à l'époque, à la Piazza del Commune, disparue elle aussi aujourd'hui.

En empruntant la Via Sebastiano Satta pour prendre une photo, on a finalement décidé de quitter l'agitation du Corso Vittorio Emanuele II pour s'enfoncer dans les petites rues de Sassari. Là, on a découvert une autre facette de la ville, plus calme, plus résidentielle, plus ancienne, moins bien préservée aussi mais pas dénuée de charme pour autant.

Dans les petites rues ombragées de Sassari, on a retrouvé l'ambiance paisible d'un petit village, les vêtements flottant dans le vent devant les fenêtres, les enfants jouant devant les maisons, une certaine douceur de vivre qui donnait envie de se perdre dans ce réseau labyrinthique de ruelles.

Teatro Civico
Teatro Civico

(Sur) les traces de l'ancienne ville fortifiée

Mais à force de petites rues, de tours et de détours, on est finalement arrivés sur la Via Aurelio Saffi, face à une tortue géante (si, si, je vous jure !) et à l'imposante façade de la Chiesa di Sant'Antonio Abate, construite entre 1700 et 1707, en face de la porte de Sant'Antonio.

A ce stade-là de notre balade, je crois que ce sont des panneaux qui nous ont poussés à rejoindre le Corso Trinità, avec l'idée que nous allions enfin voir quelques vestiges des remparts de la ville médiévale. Artère bruyante de Sassari, le Corso Trinità est bordé d'une part de bâtiments plutôt modernes et assez quelconques, et d'autre part des morceaux de murs de la citadelle médiévale, vieux de plus de 700 ans.

Certaines parties des remparts sont mieux conservées que d'autres, mais ces vestiges permettent tout de même de mieux s'imaginer ce bout d'histoire de la ville, ce fragment de ce qu'elle a été et qui fait, aussi, ce qu'elle est aujourd'hui.

La Fontana di Rosello

Tout au bout du Corso Trinità, c'est la Chiesa della Santissima Trinità construite au 18e siècle qui retiendra notre attention mais aussi et surtout la surprenante Fontana di Rosello. Située en contrebas du Corso Trinità et du Ponte di Rosello, au bout de la Via Col di Lana, la Fontana di Rosello est un des monuments emblématiques de Sassari.

La Fontana di Rosello a été érigée en 1295. C'est un monument en marbre, de style Renaissance tardif, qui représente de manière allégorique l'écoulement du temps, avec douze bouches qui symbolisent chaque mois de l'année et quatre statues qui représentent les saisons (trois des statues originales ont été détruites, la quatrième se trouve au Palazzo Ducale de Sassari).

Vue de loin, on a du mal à reconnaître qu'il s'agit d'une fontaine, et son emplacement surprenant n'aide pas à la compréhension de ce qu'est ce monument blanc, niché dans son petit écrin de verdure. Vue de plus près la Fontana di Rosello, reste surprenante, avec sa forme rectangulaire, sa pierre foncée qui contraste avec le marbre et son cavalier perché sur les arceaux qui surplombent la fontaine !

Le moins que l'on puisse dire, c'est que cette fontaine ne laisse pas indifférent et a presque des allures de mirage perdu au milieu d'une sorte de terrain vague vert et pentu !

Chiesa della Santissima Trinità
Chiesa della Santissima Trinità
Fontana di Rosello
Fontana di Rosello

Fontana di Rosello

La Cattedrale di San Nicola

Une fois revenus à la réalité dans les rues de Sassari, je suis tombée sous le charme de la façade du Palazzo Cugia avec son balcon aux influences espagnoles et sa couleur chaleureuse. Curieux de voir la Cattedrale di San Nicola indiquée par de nombreux panneaux à travers la ville, nous avons abandonné le hasard pour rejoindre son parvis ... et je suis ravie qu'on l'ai fait !

Située au cœur de Sassari, la Cattedrale di San Nicola est un véritable bijou architectural, un mélange de styles architecturaux à l'image de l'histoire de la ville dont le rendu est absolument magnifique. Dès le 12e siècle, l'existence d'une église dédiée à San Nicola di Mira est attestée par des documents monastiques.

De ce premier édifice paléochrétien, il ne reste aujourd'hui que quelques vestiges, visibles sous l'abside. L'édifice actuel a été construit au 13e siècle, dans le style roman pisan, il a ensuite été totalement rénové dans le style gothique-catalan au 15e siècle.

La façade actuelle de la cathédrale a été construite entre le 17e et le 18e siècle. Et c'est cette façade justement, magnifiquement sculptée, qui m'a fait une très forte impression lors de notre arrivée sur la Piazza del Duomo et qui est restée gravée dans mon esprit depuis !

Après cela, notre étape à Sassari s'est terminée de la meilleure manière qui soit, au pied d'une autre partie des remparts de la ville dans la Via Torre Tonda, en dégustant notre première piadina, avant de reprendre la route vers Alghero.

Palazzo Cugia

Façade de la Cattedrale di San Nicola
Franchement, elle est pas incroyable cette façade ? <3
Cattedrale di San Nicola
Cattedrale di San Nicola

Sassari, ville de contrastes

De cette étape à Sassari, il me reste un souvenir plein de douceur et d'émerveillement. La ville est souvent décrite comme bruyante et elle n'est pas forcément très mise en avant dans les guides de voyage ou même sur internet. Pourtant, Sassari mêle à merveille les époques et les styles dans toutes ses rues, sur toutes ses places ; offrant une balade singulière, hors du temps, et tout un tas de détail à observer.

Se balader dans Sassari c’est découvrir ce mélange des genres ; mais également découvrir la quiétude au cœur d’une ville animée, dans les petites rues de son centre historique, passer du bruit au silence en quelques mètres à peine, du moderne au très ancien et savourer la douceur de cette ville sarde aux bâtiments parfois délabrés et aux axes routiers bruyants …

Vous l’aurez sûrement compris, j’ai trouvé que Sassari était une ville pleine de contradictions, complexe, riche, multiple, à l'image de son passé mouvementé, mais surtout une belle ville avec un patrimoine historique et architectural remarquable et qui mérite vraiment qu'on s'y arrête !

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